Prière à Thanatos

Illustration : Thindòmiell
- Bonne nuit à toi, Thanatos
- Bonne nuit à toi, Poétesse.
- Que les rêves t'accompagnent de leurs ailes de poussière.
- Non Poétesse. Ce temps est révolu. La poussière a disparu dans le gouffre de la terre. L'obscurité du cimetière l'a réduite à un peu de gris sur mes os noirs.
- Ouvre les yeux, Thanatos, ouvre les yeux et la lumière de ton âme enfouie dans un creux de ta moelle surgira du fond des âges. À moins que la lumière ne vienne de mon monde... Ne te rappelles-tu pas cette tombe dont la dalle béait devant le vide, une racine du grand chêne sacré entre ses dents amères ? Comme un rappel du souvenir. Un lambeau de vie dans l'étau de tes crocs, une traînée d'or pur coulant dans l'hypogée.
- N'insiste pas, Poétesse. Tu ne peux pas comprendre. La poussière dorée s'est entassée sous la dalle, compressée par les années de gel, de vent et de prières, elle s'est solidifiée, scellant le dernier regard que m'avait offert le monde. Je suis l'aveugle du réel condamné à n'admirer que ma beauté d'immortel. À présent va-t-en Poétesse. Va chevaucher mes rêves de lumière.
- Bonne nuit à toi, Thanatos. Puisse le vent d'Est éroder le mont Altaï pour t'offrir la fine Poussière nacrée de l'avenir.
Je relis avec plaisir ce joli texte. Un des rares que j'ai pu entrevoir où le poète discute avec une allégorie sans surjouer. C'est malheureusement souvent le cas, avec toutes les grandiloquences d'usage.
le 25 Mar 2011Mais là, non, c'est tout fin, ce n'est pas fait pour grimper sur un piédestal placé un peu trop haut. Juste un salut en passant. J'aime beaucoup.